La Petite-Fille - SCHLINK Bernhard

Couverture La Petite-Fille

Prix Babelio 2023 - À la mort de son épouse Birgit, Kaspar découvre un pan de sa vie qu'il avait toujours ignoré : avant de quitter la RDA pour passer à l'Ouest en 1965, Birgit avait abandonné un bébé à la naissance. Intrigué, Kaspar ferme sa librairie à Berlin et part à la recherche de cette belle-fille inconnue. Son enquête le conduit jusqu'à Svenja, qui mène une tout autre vie que lui : restée en Allemagne de l'Est, elle a épousé un néo-nazi et élevé dans cette doctrine une fille nommée Sigrun. Kaspar serait prêt à voir en elles les membres d'une nouvelle famille. Mais leurs différences idéologiques font obstacle : comment comprendre qu'une adolescente, par ailleurs intelligente, puisse soutenir des théories complotistes et racistes ? Comment l'amour peut-il naître dans ce climat de méfiance et de haine ? Cette rencontre contrariée entre un grand-père et sa petite-fille nous entraîne dans un passionnant voyage politique à travers l'histoire et les territoires allemands. Plus de vingt-cinq ans après Le liseur, Bernhard Schlink offre de nouveau un grand roman sur l'Allemagne qui sonde puissamment la place du passé dans le présent, et nous interroge sur ce qui peut unir ou séparer les êtres.
   

Biographie de l'auteur

Bernhard Schlink, né en 1944, est un écrivain allemand.

Il étudie le droit à l'Université de Heidelberg, puis à l'Université libre de Berlin, et exerce comme professeur à Bonn et à Francfort. Depuis 1992, il est professeur de droit public et de philosophie du droit à l'Université Humboldt de Berlin.
De 1987 à 2006, il est également devenu juge au tribunal constitutionnel du Land de Rhénanie-du-Nord-Westphalie.

Il a débuté sa carrière comme écrivain par plusieurs romans policiers, dont le premier, "Brouillard sur Mannheim" ("Selbs Justiz", 1987), est écrit en collaboration avec son ami Walter Popp. On retrouve dans les romans policiers suivants son personnage principal, Gerhard Selb (Selb vient de "selbst" qui veut dire "soi-même", l’auteur s'étant imaginé plus âgé).
L'un de ces romans "Le Nœud Gordien" ("Die gordische Schleife", 1988) a obtenu le prix Glauser en 1989.
En 1995, il publie "Le liseur" ("Der Vorleser"), un roman partiellement autobiographique. Ce livre devient rapidement un best-seller et est traduit dans 37 langues. Il a été le premier livre allemand à arriver en première position sur la liste de best-sellers publiée par le New-York Times. Pour "Le Liseur", Bernhard Schlink reçoit de nombreux prix, notamment le prix Laure Bataillon 1997, prix décerné à des œuvres traduites en français.
"Le Liseur" a été adapté au cinéma sous le titre "The Reader" en 2008. Pour son rôle dans le film, Kate Winslet a remporté L'Oscar de la meilleure actrice à la cérémonie des Oscars 2008.

Il publie encore des recueils de nouvelles "Amours en fuite" ("Liebesfluchten", 2000) et "Mensonges d'été" ("Sommerlügen", 2010), et des romans "Le Retour" ("Die Heimkehr", 2006), "Le Week-end" ("Das Wochenende", 2008), "La Femme sur l'escalier" ("Die Frau auf der Treppe", 2014), "La petite-fille" ("Die Enkelin", 2021).
Bernhard Schlink a également reçu le prix littéraire du journal "Die Welt" en 1999, le Prix Heinrich Heine en 2000 et le Prix Park Kyung-ni en 2014.

Date première édition: février 2023

Editeur: Gallimard

Genre: Roman , Roman historique

Mots clés :

Notre avis : 7 / 10 (1 note)

Enregistré le: 21 novembre 2024



Michel-Henri
Appréciation de lecture
La Petite-Fille
Appréciation : 7 / 10
Commentaire #1 du : 22 novembre 2024
Kaspar le héros de ce livre est un être qui peut nous paraître un peu falot, effacé, mais sa ténacité dans la façon d'exprimer son amour, ses doutes sur lui-même et sur la bonne attitude à avoir vis-à-vis de la vie, des autres, nous le rendent attachant.
Il faudrait qu'il mesure son amour pour Birgit à l'aune de sa réciproque puisqu'elle l'aime, mais sans se donner entièrement, elle garde sa part d'ombre, mais il en est incapable. Lui est tout entier dans son amour. Et quand elle meurt, son amour va transcender cette disparition. Il va le reporter dans sa recherche de la vérité puis dans son amour non pas pour la fille de Birgit, incapable de donner, de pardonner, mais sur Sigrun sa petite-fille.

Ce n'est pas un long fleuve tranquille. Cette petite-fille ballottée par l'idéologie mortifère de son père va être révélée à elle-même par l'amour de son grand-père. En l'aimant, en lui permettant d’accéder à son passé, elle pourra se déprendre de sa lourde histoire.

En même temps ce roman nous permet de comprendre mieux l'histoire de la réunification de l'Allemagne. Tout est ambigu pour eux. Certes, ils ont été libérés, libération de la parole, libération de la peur, mais on leur a demandé aussi de n'être plus eux-mêmes, de devenir autres. Ils se sentirent colonisés dans leur propre pays, méprisés pour tout ce qui faisait leur vie d'avant, le mauvais comme le bon. Remplacée la mesquine bureaucratie par la vertueuse compétition capitaliste ! Vous ne pouvez vous adapter assez vite à la nouvelle donne, c'est vous qui êtes responsables, trop formatés dans vos têtes par l'idéologie de l'Est. Vous n'êtes plus rien.
Comment s'étonner que certains de cette génération perdue se soit réfugiés dans un farouche repli sur soi, sur un nationalisme raciste d'un autre âge ? L'ennemi, c'est l'autre, le différent, qu'il vienne de l'Ouest moins identifiable, du Sud cible facile et toute trouvée.
Bernard Schlink ne veut pas défendre l'extrême-droite, mais la comprendre pour mieux la combattre.
Son roman à certains égards peut sembler un peu naïf mais que faire d'autre que d'opposer à la haine issue du ressentiment, l'amour, la tendresse d'un grand-père putatif pour sa petite-fille.

Citations :
"Mais dans les semaines suivantes, on n'alla pas au-delà de la vivacité confiante du premier soir. Aucun des deux n'eut la patience de se familiariser avec la quantité de vie que l'autre avait accumulée. C'eût été tout un travail, et ils ne souffraient pas assez de leur solitude pour se mettre à ce travail."

"Vous autres, vous ne tirez pas ? Vous tabassez le dealer nigérien pour qu’il s’aperçoive qu’il n’est pas le bienvenu en Allemagne ? Tu crois qu’il ne le sait pas ? Et les journalistes – oui, ils n’oublieront pas, je ne l’oublierais pas non plus, si ma voiture brûlait devant ma porte. Et alors ? Tu crois que le journaliste va se mettre à écrire autrement ? Ou n’osera plus écrire ? Crois-tu que si vous incendiez ma voiture parce que je ne vends pas de bons livres, j’arrêterai ? C’est quoi, toutes ces âneries, Sigrun ? La vie est ailleurs. La vie, c’est la musique et le travail. Fais des études, apprends quelque chose aux enfants, soigne des malades, construis des maisons ou donne des concerts – tu es intelligente, tu es forte, fais-en quelque chose. Personne ne reprendra la Prusse-Orientale et la Silésie. L’Allemagne ne deviendra pas plus grande, mais elle n’est pas trop petite, et ses coutures ne craquent pas par la faute des immigrés. Et on a besoin d’eux : qui d’autre veut encore ramasser les asperges, faire les vendanges et tuer les porcs ? Si la ferme de ton père tourne bien, qu’il a besoin d’un commis et qu’il ne trouve qu’un étranger, il l’embauchera. Il devra apprendre l’allemand et obéir aux lois comme tous les autres, mais s’il le fait, où est le problème ? Qu’on vive en Allemand völkisch, en Allemand tout court ou en immigré devenu allemand, que les noces soient célébrées sur le pré, ou le mariage à l’église, ou que les Juifs brisent un verre à l’abri d’une tente – qu’est-ce que ça peut faire ? Laisse les gens vivre comme ils veulent, laisse-les vivre. » Il venait d’exploser et cela l’embarrassait, mais ça lui avait fait du bien."

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